
« Mon projet de résidence s’inscrit dans ce cadre un peu particulier qu’est « La Marelle prend l’eau », c’est-à-dire une « double » résidence, en Algérie et à Marseille. C’est l’Algérie qui a motivé ma demande pour cette résidence. Mes parents y ont passé quelques années de leur vie, je n’étais alors pas née. Mon père y était militaire, ma mère n’avait pas 20 ans quand elle a embarqué à Marseille pour le rejoindre. Je vais y aller à mon tour et je ressens important ce voyage, comme un chemin nécessaire, je ne saurai pas aujourd’hui dire pourquoi. Peut-être pour comprendre mon mutisme, mon refus du dialogue sur « ces années-là », et tenter de libérer les mots ? Pour marcher dans leur pas, je ne crois pas, après tout, c’est leur histoire… Est-ce aussi un peu la mienne ? Je pense aussi à ma grand-mère qui a fait le voyage. Je l’imagine sur le port de Marseille, je la vois seule au bastingage – à quoi pensait-elle ? Qui était cette femme ?Laurence Vilaine © JD BillaudLaurence Vilaine © JD BillaudLaurence Vilaine © JD Billaud Je me dis, voyager, c’est partir à la rencontre de l’autre et de soi-même, de soi-même grâce à l’autre. Est-ce que je pars à la rencontre de ces femmes qui m’ont précédée, de ces épouses, de ces mères, de moi tout au fond ? Le voyage ne sera pas que solitaire et il se fera aussi par le biais de l’écriture : j’écrirai avec d’autres femmes, algériennes d’Alger, algériennes de Marseille, femmes d’ici, de là et d’ailleurs, pour partager, explorer, tenter de répondre. Oui, quelque chose de cet ordre-là qui se « fabrique » ensemble. Quand j’étais petite, on me disait : « Tu verras plus tard, quand tu seras une femme. » Je verrai quoi ? Qui suis-je aujourd’hui ? Qui sommes-nous ? »
Voici le point de départ du travail d’écriture collectif
À Marseille, à Alger, des femmes s’interrogent et interrogent leur place dans le monde.
À distance, ensemble, elles tirent le fil pour faire surgir les mots du dedans, là où se dit le plus juste et le plus vrai. Chacune écrira un texte – une réflexion, un ressenti, un aveu, un cri, un murmure, un tableau de soi ou un portrait d’une autre, une crainte, un rêve, un désir : un écrit qui tentera de dire tout le possible.
Entre les deux territoires, marseillais et algérois, la résidence va tenter de lancer des pistes de réflexion, des ponts, des points d’interrogation. Autant d’explorations qui nourriront l’écriture naissante, en cours, à venir.
Découvrez un extrait inédit du nouveau texte de Laurence Vilaine dans la revue numéro 3 La première chose que je peux vous dire, et un extrait du texte écrit lors du prélude à sa résidence à La Marelle en 2013.
Résidence soutenue par le Conseil Général des Bouches-du-Rhône et l’Institut Français en partenariat avec la Ville de Marseille.
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